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vernement la sagesse et les lumières de ceux qui l’avaient établi. Voici comment s’exprime à ce sujet l’auteur de l’Histoire philosophique et politique des deux Indes :

« Le vice d’une constitution où les pouvoirs étaient si mal partagés ne tarda pas à se manifester. Les seigneurs propriétaires, imbus de principes tyranniques, tendaient de toutes leurs forces au despotisme. Les colons, éclairés sur les droits de l’homme, mettaient tout en œuvre pour éviter la servitude. Du choc de ces intérêts opposés naissait une agitation inévitable, qui arrêtait perpétuellement les travaux utiles. La province entière, livrée aux querelles, aux dissensions, aux tumultes qui la déchiraient, ne faisait aucun des progrès qu’on s’était promis des avantages de sa situation. Ce n’était pas assez de maux, et leur remède devait naître de leur excès. Granville, qui seul, comme doyen des propriétaires, tenait en 1705 les rênes du pouvoir, voulut asservir au rit de l’église anglicane tous les non-conformistes, qui faisaient les deux tiers de la population. Cet acte de violence, quoique désavoué et réprouvé par la métropole, souleva les esprits. Durant le cours des suites et des progrès de cette animosité, la province fut attaquée en 1710 par différentes hordes de sauvages, qu’un enchaînement d’insultes et d’injustices atroces avait poussés au désespoir. Ces malheureux, battus partout, furent partout exterminés. Mais le courage et la vigueur