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parer. De temps en temps on découvre leurs cercueils pour les revêtir de nouveaux habits. On se prive d’une partie de ses alimens pour les porter sur leur sépulture, et dans les lieux où l’on s’imagine que leurs âmes se promènent. En un mot, on prend plus de soin, des morts que des vivans. Aussitôt que le malade a rendu l’esprit, tout retentit de gémissemens ; et cette scène dure autant que la famille est en état de fournir à la dépense ; car, dans tout l’intervalle, on ne cesse point de tenir table ouverte. Le cadavre, paré de sa plus belle robe, le visage peint, ses armes, et tout ce qu’il possédait, à côté de lui, est exposé à la porte de la cabane, dans la même posture qu’il doit avoir au tombeau ; et c’est, en plusieurs endroits, celle d’un enfant dans le sein de sa mère. L’usage, dans quelques nations, est que les parens du mort jeûnent pendant le cours des funérailles. Ce temps est donné aux pleurs, aux complimens, aux éloges de la personne qu’on a perdue. Chez d’autres, on loue des pleureuses, qui exercent fort bien cet office : elles chantent, dansent et pleurent en cadence. On porte le corps, sans cérémonie, au lieu de la sépulture ; mais lorsqu’il y est déposé, on le couvre avec tant de précautions, que la terre ne puisse le toucher. Sa fosse est une cellule tapissée de bonnes peaux, et beaucoup plus riche qu’une cabane. On dresse ensuite, sur la tombe un pilier de bois, auquel on attache tout ce qui peut marquer l’estime qu’on faisait du mort. Quelquefois on y