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n’est pas en droit d’en contraindre un autre. Une mère qui voit tenir une mauvaise conduite à sa fille se met à pleurer : la fille lui demande le sujet de ses larmes ; elle se contente de répondre : « Tu me déshonores ; » et cette méthode est rarement sans effet. La plus sévère punition que les sauvages emploient pour corriger leurs enfans, est de leur jeter un peu d’eau au visage, et les enfans y sont fort sensibles. On a vu des filles s’étrangler pour avoir reçu quelque légère réprimande de leur mère ou quelques gouttes d’eau au visage ; et l’en avertir en lui disant : « Tu n’auras plus de fille. » Il semble qu’une enfance si mal disciplinée devrait être suivie d’une jeunesse turbulente et corrompue ; mais, d’un côté, les sauvages sont naturellement tranquilles et maîtres d’eux-mêmes ; et d’un autre, leur tempérament, surtout dans les nations du nord, ne les porte point à la débauche. Le P. Charlevoix assure que, s’ils ont quelques usages où la pudeur est peu ménagée, la superstition y a plus de part que la dépravation du cœur. « Les Hurons, dit-il, lorsque nous commençâmes à les connaître, étaient plus lascifs, et brutaux même dans leurs plaisirs. Dans les deux sexes, les jeunes gens s’abandonnaient sans honte à toutes sortes de dissolutions et c’était principalement parmi eux qu’on ne faisait pas un crime à une fille de s’être prostituée. Leurs parens étaient les premiers à les y engager, et l’on voyait des maris en faire autant de leurs femmes pour un vil in-