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L’intérieur de la Guiane n’est pas aujourd’hui plus fréquenté, ni peut-être mieux connu qu’il ne l’était il y a deux siècles. Quelques missionnaires y ont tourné leurs courses évangéliques, mais avec si peu d’ordre dans leurs observations, qu’ils n’y a presque aucune lumière à recueillir de leurs journaux : ils nomment des lieux dont ils ne marquent point la position ; ils avancent au hasard sans jeter les yeux autour d’eux. On fait deux cents lieues avec les PP. Grillet et Béchamel, et l’on ne rapporte que la fatigue de les avoir suivis. D’autres, dont on retrouve quelques relations fort courtes dans le Recueil des Lettres édifiantes, se bornent au récit de leurs missions, et se croient quittes en nommant quelques églises qu’ils ont formées dans les terres, sans nous en apprendre la situation.

La relation la plus propre à exciter la curiosité sur la Guiane est celle du célèbre et infortuné Walter Raleigh, qui entreprit, en 1595, de pénétrer dans cette région, que l’on appelait le pays de l’or, et dans lequel se trouvait, disait-on, le fameux el Dorado, objet des recherches de tous les aventuriers dans le seizième siècle. Raleigh se proposa de découvrir la Guiane en remontant les bouches de l’Orénoque. Il se rendit en conséquence à la Trinité, l’une de ces îles, et cacha soigneusement son dessein aux Espagnols, maîtres du pays, dont il craignait avec raison la jalousie tyrannique, et contre lesquels il