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gîte pour la nuit. On les laisse dans cette misère, parce qu’il n’y a point d’habitant qui ose prendre confiance à leurs services. Quelquefois un négociant qui passe dans les provinces intérieures, et qui a besoin de grossir sa suite, choisit un de ces malheureux chapetons, qu’il emmène avec lui. Le chagrin d’une si triste condition et la mauvaise qualité de la nourriture les jettent enfin dans une maladie qui a pris d’eux le nom de chapetonade. Ils n’ont plus alors d’autre refuge que la Providence ; car on ne reçoit à l’hôpital de Carthagène que ceux qui paient les secours qu’ils demandent, et par conséquent la misère est un titre d’exclusion. C’est à ce point que le peuple les attend pour faire éclater sa charité. Les négresses et les mulâtresses libres s’empressent alors de les retirer dans leurs maisons, où elles les assistent et les font guérir à leurs dépens ; s’ils meurent entre leurs mains, elles les font enterrer, et leur zèle va jusqu’à faire dire pour eux des prières : et des messes. À la vérité les témoignages de compassion finissent, pour ceux qui reviennent à la santé, par un mariage avec leur bienfaitrice, ou avec quelqu’une de ses filles. Les pulizons qui n’ont pas le bonheur d’être assez malades pour intéresser la pitié de femmes de Carthagène, prennent à la fin le parti de se faire canotiers, ou de se retirer dans quelques villages pour y vivre de la culture des terres et du fruit de leur travail.

» L’eau-de-vie, le chocolat, les confitures