Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 15.djvu/50

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de la Sonde. Notre impatience nous fit entrer sur-le-champ dans un canot pour nous rendre au quai. En traversant la barre, le canot se renversa, et M. Gobson tomba dans l’eau. Nous n’eûmes pas peu de peine à l’en tirer ; mais enfin, l’ayant repris à bord y nous espérâmes que la prédiction ne s’accomplirait pas sur lui. Cependant il avait avalé tant d’eau, qu’après savoir langui trois ou quatre jours, tous nos soins ne purent l’empêcher de mourir à la caye de la Sonde.

« Nous nous approchâmes des deux vaisseaux. C’était une felouque anglaise, avec une tartane espagnole, que les Anglais avaient enlevée depuis quelques jours. La forme de la tartane nous effraya, et ne causa pas moins d’épouvante à quelques Américains qui nous accompagnaient. Ils regardaient les Espagnols, comme leurs plus grands ennemis : mais, quoique nous ne les crussions pas moins les nôtres, et que nous ignorassions encore lequel des deux bâtimens était soumis à l’autre, nous eûmes l’audace de nous avancer jusqu’au vaisseau anglais, où nous reconnûmes M. Dampier, et plusieurs de nos anciens compagnons. Ils nous reçurent avec des transports de joie : je fus le seul qu’ils ne reconnurent pas tout d’un coup. Comme j’étais peint à la manière des Américains et nu comme eux, à la réserve de mon haut-de-chausse, que j’avais repris après avoir quitté Lacenta, je voulus me donner le plaisir de voir si mes anciens amis me reconnaîtraient