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bonheur d’en rencontrer un qui était creux d’un côté, avec une ouverture à trois ou quatre pieds de terre. J’y entrai, et je m’assis sur un nœud qui s’y trouvait. Là, m’abandonnant aux plus tristes réflexions, j’attendis le jour avec des mouvemens que je ne puis représenter, dans la crainte continuelle que mon arbre n’eût le sort de plusieurs autres, qui étaient emportés par la violence des eaux, et dont le choc me faisait trembler. Enfin j’aperçus les premiers rayons du jour, et je sentis renaître la joie dans mon cœur. En effet, la pluie et les éclairs cessèrent, les eaux s’écoulèrent assez vite, et le soleil se leva. Je sortis alors de ma retraite pour chercher l’endroit où nous avions fait du feu, dans l’espérance d’y retrouver quelqu’un de mes compagnons ; mais je ne vis personne, et les échos seuls répondirent aux cris que je poussai pour les appeler. Ma douleur devint si vive, que j’enviai le sort de ceux que je croyais entraînés par la fureur des eaux ; et, dans cet accès de désespoir, je me laissai tomber par terre comme mort. Cependant Gobson et les trois autres, qui avaient aussi trouvé leur salut dans des arbres creux, et qui en avaient été quittes pour les mêmes alarmes, vinrent me joindre et me rappeler à la vie. Nous nous embrassâmes, les larmes aux yeux, en remerciant le ciel de notre conservation. Nos raisonnemens sur l’inondation nous firent conclure que pendant les grandes pluies la pente des montagnes formait des torrens qui grossissaient aus-