Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 15.djvu/360

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rendent pas cent pour un. Les raisins de toute espèce croissent en perfection ; on en fait des vins plus estimés que ceux du Pérou, et la plupart rouges. Les raisins muscats surpassent les meilleurs vins d’Espagne pour l’odeur et pour le goût ; mais toutes les espèces de raisins croissent en treilles, et non en ceps. Enfin, pour comprendre à quel point les denrées abondent dans le pays, il suffit de savoir qu’un bœuf le mieux engraissé ne s’y vend que quatre piastres.

La manière de tuer le bétail, pour la boucherie, ne passerait que pour un amusement, si l’on n’assurait qu’elle sert à rendre la chair beaucoup meilleure. On enferme un troupeau de bœufs dans une basse-cour, et les Guases se mettent à cheval devant la porte, armés d’une lance de deux ou trois brasses de long, qui se termine par une espèce de croissant d’acier bien affilé, dont les pointes sont à près d’un pied l’une de l’autre. Ils ouvrent les portes de la basse-cour et font sortir un bœuf, qui prend aussitôt sa course pour retourner à son gîte. Un Guase le suit, l’atteint, lui coupe un jarret en courant ; l’autre ensuite, et met pied à terre pour le tuer : après quoi, il le dépouille, ôte la graisse, et dépèce la chair. Le suif est enveloppé dans le cuir, et tout est porté à la métairie sur la croupe du cheval. Quelquefois on fait sortir ensemble autant de bœufs qu’il y a de Guases pour les tuer. Cet exercice dure plusieurs jours, jusqu’à ce qu’on ait achevé de tuer le nombre destiné pour la vente. Si le bœuf