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vait rendre au moins douteuse une mort qui n’était que trop certaine avec les remèdes ordinaires. Un raisonnement si simple avait dû se présenter à tous ceux qui entendaient parler de la nouvelle opération ; mais ce religieux fut le premier en Amérique qui eut le courage de la tenter. Il fit insérer la petite-vérole à tous les habitans de la mission qui n’en avaient pas encore été attaqués ; et de ce moment il n’en perdit plus un seul. Un autre missionnaire de Rio-Négro suivit son exemple avec le même succès. Après deux expériences si authentiques, on s’imaginerait que, dans la contagion qui retenait La Condamine au Para, tous ceux qui avaient des esclaves eurent recours à la même recette pour les conserver. Il le croirait lui-même, dit-il, s’il n’avait été témoin du contraire. On n’y pensait point encore lorsqu’il partit du Para.

Il s’embarqua le 29 décembre dans un canot du général avec un équipage de vingt-deux rameurs, et muni de recommandations pour les missionnaires franciscains de l’île Joanes ou Marayo, qui devaient lui fournir un nouvel équipage pour continuer sa route ; mais n’ayant pu trouver un bon pilote dans quatre villages de ces pères, où il aborda le premier jour de janvier 1744, et livré à l’inexpérience de ses Indiens et à la timidité du mamelus[1] ou

  1. Nom qu’on donne, au Brésil, aux enfans des Portugais et des femmes indiennes.