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quatorze rameurs avec un patron pour les commander, et un guide portugais dans un autre petit canot. Au lieu de maisons et d’églises de roseaux, on commence à voir dans cette mission des chapelles et des presbytères de maçonnerie, de terre et de brique, et des murailles blanchies proprement. Il parut encore plus surprenant à La Condamine de remarquer au milieu de ces déserts des chemises de toile de Bretagne à toutes les femmes, des coffres avec des ferrures et des clefs de fer dans leur ménage, et d’y trouver des aiguilles, de petits miroirs, des couteaux, des ciseaux, des peignes, et divers autres petits meubles d’Europe, que les Américains se procurent tous les ans au Para, dans les voyages qu’ils y font pour y porter le cacao, qu’ils recueillent sans culture sur le bord du fleuve. Ce commerce leur donne un air d’aisance qui fait distinguer au premier coup d’œil les missions portugaises des missions castillanes du haut Maragnon, dans lesquelles tout se ressent de l’impossibilité où l’éloignement les met de se fournir d’aucune des commodités de la vie. Elles tirent tout de Quito, où à peine envoient-elles une fois l’année, parce qu’elles en sont plus séparées par la cordilière qu’elles ne le seraient par une mer de mille lieues.

Les canots des Indiens soumis aux Portugais sont beaucoup plus grands et plus commodes que ceux des Indiens espagnols. Le tronc d’arbre qui fait tout le corps des derniers ne