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pluie, sous un long toit arrondi, fait d’un tissu de feuilles de palmiers entrelacées, que les Indiens préparent avec art. Ce berceau est interrompu et coupé dans son milieu pour donner du jour au canot, et pour y entrer commodément. Un toit volant de même matière, qui glisse sur le toit fixe, sert à couvrir cette ouverture, et tient lieu tout à la fois de porte et de fenêtre. La résolution des deux voyageurs était de marcher nuit et jour pour atteindre s’il était possible, les brigantins ou grands canots que les missionnaires portugais dépêchaient tous les ans au Para pour en faire venir leurs provisions. Les Indiens ramaient le jour, et deux seulement faisaient la garde pendant la nuit, l’un à la proue, l’autre à la poupe, pour conduire le canot dans le fil du courant.

Le 26, il laissa au nord la rivière du Tigre, qu’il juge plus grande que le fleuve du même nom en Asie. Le même jour il s’arrêta du même côté dans une nouvelle mission de sauvages récemment sortis des bois, et nommés Yaméos. Leur langue est d’une difficulté inexprimable, et leur manière de prononcer est encore plus extraordinaire. Ils parlent en retirant leur haleine, et ne font sonner presque aucune voyelle. Une partie de leurs mots ne pourraient être écrits, même imparfaitement, sans y employer moins de neuf ou dix syllabes ; et ces mots, prononcés par eux, semblent n’en avoir que trois ou quatre. Poettarrarorincouroac signifie dans leur langue le nombre de trois. Ils ne savent