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jours qu’il passa dans le hameau de Chuchunga : « Je n’avais, dit-il, ni voleurs, ni curieux à craindre : j’étais au milieu des sauvages. Je me délassais parmi eux d’avoir vécu avec des hommes ; et, si j’ose le dire, je n’en regrettais pas le commerce. Après plusieurs années passées dans une agitation continuelle, je jouissais pour la première fois d’une douce tranquillité. Le souvenir de mes fatigues, de mes peines et de mes périls passés, me paraissait un songe. Le silence qui régnait dans cette solitude me la rendait plus aimable : il me semblait que j’y respirais plus librement. La chaleur du climat était tempérée par la fraîcheur des eaux d’une rivière à peine sortie de sa source, et par l’épaisseur du bois qui en ombrageait les bords. Un nombre prodigieux de plantes singulières et de fleurs inconnues m’offrait un spectacle nouveau et varié. Dans les intervalles de mon travail je partageais les plaisirs innocens de mes Indiens ; je me baignais avec eux, j’admirais leur industrie à la chasse et à la pêche. Ils m’offraient l’élite de leur poisson et de leur gibier ; tous étaient à mes ordres : le cacique qui les commandait était le plus empressé à me servir. J’étais éclairé avec des bois de senteur et des racines odoriférantes. Le sable sur lequel je marchais était mêlé d’or. On vint me dire que mon radeau était prêt, et j’oubliai toutes ces délices. »

Le 4 juillet après midi, il s’embarqua dans un petit canot de deux rameurs, précédé de la