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de cacao, qui n’est pas moins bon que celui qu’on cultive, mais dont les Américains du pays ne font pas plus de cas que de l’or, qu’ils ne ramassent que lorsqu’on les presse de payer leur tribut.

Le quatrième jour, après être parti de Jaën, La Condamine traversa vingt-une fois à gué le torrent de Chuchunga, et la vingt-deuxième fois en bateau. Les mules, en approchant du gîte, se jetèrent à la nage toutes chargées, et l’académicien eut le chagrin de voir ses papiers, ses livres et ses instrumens mouillés. C’était le quatrième accident de cette espèce qu’il avait essuyé depuis qu’il voyageait dans les montagnes : « Mes naufrages, dit-il, ne cessèrent qu’à mon débarquement. »

Le port de Jaën, qui se nomme Chuchunga, est un hameau de dix familles indiennes, gouvernées par un cacique. La Condamine avait été obligé de se défaire de deux jeunes métis qui auraient pu lui servir d’interprètes. La nécessité lui fit trouver le moyen d’y suppléer. Il savait à peu près autant de mots de la langue des incas, que parlaient ces Indiens, que ceux-ci en savaient de la langue espagnole. Ne trouvant à Chuchunga que de très-petits canots, et celui qu’il attendait de San-Iago ne pouvant arriver de quinze jours, il engagea le cacique à faire construire une balze assez grande pour le porter avec son bagage. Ce travail lui donna le temps de faire sécher ses papiers et ses livres. Il fait une peinture charmante des huit