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province de Fernambouc, aimant mieux renoncer à toutes leurs possessions que de se soumettre aux Portugais, se bannirent volontairement de leur patrie. Ils abandonnèrent environ quatre-vingt-quatre gros bourgs où ils étaient établis, sans y laisser une créature vivante. Le premier chemin qu’ils prirent fut à la gauche des Cordilières : ils traversèrent toutes les eaux qui en descendent. Ensuite la nécessité les forçant de se diviser, une partie pénétra jusqu’au Pérou, et s’arrêta dans un établissement espagnol voisin des sources de Cayary. Mais après quelque séjour il arriva qu’un Espagnol fit fouetter un Topinambou pour avoir tué une vache. Cette injure causa tant d’indignation à tous les autres, que, s’étant jetés dans leurs canots, ils descendirent la rivière jusqu’à la grande île qu’ils occupent aujourd’hui.

Ils parlent la langue générale du Brésil, qui s’étend dans toutes les provinces de cette contrée, jusqu’à celle de Para. Ils racontèrent au P. d’Acugna que leurs ancêtres, n’ayant pu trouver, en sortant du Brésil, de quoi se nourrir dans les déserts qu’ils eurent à traverser, furent contraints pendant une marche de plus de neuf cents lieues, de se séparer plusieurs fois, et que ces différens corps peuplèrent diverses parties des montagnes du Pérou. Ceux qui étaient descendus jusqu’à la rivière des Amazones eurent à combattre les insulaires, dont ils prirent la place, et les vainquirent tant de fois, qu’après en avoir détruit une partie, ils