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dans cette pénible station , et l’on se rendit le même jour à Cagnar, gros bourg peuplé d’Espagnols, à cinq lieues au sud de l’Assouay. En voyant de loin les nuages, les tonnerres et les éclairs qui avaient duré plusieurs jours, et la neige qui était tombée sans relâche sur la cime de la montagne, les habitans du canton avaient jugé que tous les mathématiciens y avaient péri : ce n’était pas la première fois qu’on en avait fait courir le bruit, et dans cette occasion on fit pour eus des prières publiques à Cagnar.

Mais souvenons-nous que l’objet de cet article n’est pas de les suivre dans toutes leurs stations, et qu’il suffit d’avoir représenté une partie des obstacles qu’ils eurent presque sans cesse à combattre. On a déjà dit que, depuis le commencement d’août 1737 jusqu’à la fin de juillet 1739, la compagnie de Bouguer et La Condamine habita sur trente-cinq différentes montagnes, et celle de Godin sur trente-deux.

Dès l’année 1735, avant le départ des académiciens, La Condamine avait proposé de fixer les deux termes de la base fondamentale des opérations qu’ils allaient faire au Pérou par deux monumens durables, tels que deux colonnes, ou obélisques, ou pyramides, dont l’usage serait expliqué par une inscription. Le projet fut approuvé de l’académie des sciences. Celle des belles-lettres rédigea l’inscription. On eut pour but de n’y rien insérer qui pût déplaire à la nation espagnole ou blesser les