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en dérobaient la vue, nous sortions de notre cabane pour nous échauffer un peu par l’exercice. Tantôt nous descendions un petit espace et nous le remontions aussitôt ; tantôt notre amusement était de faire rouler de gros quartiers de roche du haut en bas, et nous éprouvions avec étonnement que nos forces réunies égalaient à peine celle du vent pour les remuer. Au reste, nous n’osions nous écarter beaucoup de la pointe de notre rocher, dans la crainte de n’y pouvoir revenir assez promptement lorsque les nuages commençaient à s’en emparer, comme il arrivait souvent et toujours fort vite.

» La porte de notre cabane était fermée de cuirs de bœuf, et nous avions grand soin de boucher les moindres trous pour empêcher le vent d’y pénétrer ; quoiqu’elle fût bien couverte de paille, il ne laissait pas de s’y introduire par le toit. Obligés de nous renfermer dans cette chaumière, où la lumière ne pénétrait pas bien, les jours, par leur entière obscurité, se distinguaient à peine des nuits : nous tenions toujours quelques chandelles allumées ; tant pour nous reconnaître les uns les autres que pour pouvoir lire ou travailler dans un si petit espace. La chaleur des lumières et celle de nos haleines ne nous dispensaient pas d’avoir chacun notre brasier pour tempérer la rigueur du froid. Cette précaution nous aurait suffi, si, lorsqu’il avait neigé le plus abondamment, nous n’eussions été obligés de sortir, munis de pel-