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mesurer la méridienne, mérite d’être racontée successivement dans les termes d’Ulloa et de La Condamine. On peut observer la différence des caractères dans celle des relations, et l’on verra dans celle de La Condamine un fonds de gaîté qui ne s’altère jamais, et qui n’était pas le don le moins précieux qu’il eût reçu de la nature.

« Je n’offre, dit Ulloa, qu’un récit abrégé de ce que nous eûmes à souffrir sur le Pichincha ; car, toutes les autres montagnes et roches étant presque également sujettes aux injures du froid et des vents, il sera aisé de juger du courage et de la constance dont il fallut nous armer pour soutenir un travail qui nous exposait à des incommodités insupportables, et souvent au danger de périr. Toute la différence consistait dans le plus ou le moins d’éloignement des vivres, et dans le degré d’intempérie, qui devenait plus ou moins sensible suivant la hauteur des lieux et la nature du temps. Nous nous tenions ordinairement dans la cabane, non-seulement à cause de la rigueur du froid et de la violence des vents, mais encore parce que nous étions le plus souvent enveloppés d’un nuage si épais, qu’il ne nous permettait pas de voir distinctement à la distance de sept ou huit pas. Quelquefois ces ténèbres cessaient, et le ciel devenait plus clair lorsque les nuages, affaissés par leur propre poids, descendaient au col de la montagne, et l’environnaient souvent de fort près, quelquefois d’assez loin. Alors