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mètre de huit à neuf cents toises. Elle est bordée de roches escarpées, dont la partie extérieure est couverte de neige ; l’intérieure est noirâtre et calcinée. Ce vaste gouffre est séparé en deux comme par une muraille de même matière qui s’étend de l’est à l’ouest. Je ne jugeai pas la profondeur de la cavité, du côté où nous étions, de plus de cent toises ; mais je ne pouvais pas en apercevoir le centre, qui vraisemblablement était plus profond. Tout ce que je voyais ne me parut être que les débris éboulés de la cime de la montagne. Un amas confus de rochers énormes, brisés et entassés irrégulièrement les uns sur les autres, présentait à mes yeux une vive image du chaos des poëtes. La neige n’était pas fondue partout : elle subsistait en quelques endroits ; mais les matières calcinées qui s’y mêlaient, et peut-être les exhalaisons du volcan, lui donnaient une couleur jaunâtre ; du reste, nous ne vîmes aucune fumée. Un pan de l’enceinte entièrement éboulé du côté de l’ouest empêche qu’elle ne soit tout-à-fait circulaire, et c’est le seul côté par lequel il semble possible de pénétrer au-dedans. J’avais porté une boussole, à dessein de prendre quelques relèvemens, et je m’y préparais malgré un vent glacial qui nous gelait les pieds et les mains, et nous coupait le visage, lorsque M. Bouguer me proposa de nous en retourner. Le conseil fut donné si à propos, que je ne pus résister à la force de la persuasion. Nous reprîmes le chemin de la tente, et nous descen-