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geur, qui porta dans cette entreprise une activité étonnante, une curiosité avide et insatiable, une intrépidité à l’épreuve de tous les périls ; enfin cette espèce d’héroïsme qui n’est pas celui de l’imagination, que le préjugé peut exalter un moment, mais qui tient à cette force d’âme, de toutes les qualités humaines la plus rare et la plus difficile.

Avant d’entrer dans le détail de ce voyage, il convient de dire un mot de la question physique qui en était l’objet.

Jusqu’au règne des sciences, surtout avant qu’on eût entrepris de longs voyages sur l’Océan, l’opinion d’un fameux philosophe, qui croyait la terre absolument plate, fut la seule reçue parmi les hommes. Ce ne fut que par degrés qu’ils sortirent de cette erreur. Il y a beaucoup d’apparence que les premiers pas vers la vérité se firent en observant que, sur mer et sur terre, on ne pouvait s’éloigner d’une montagne ou d’une tour sans les perdre bientôt de vue. On remarqua sans doute aussi que la hauteur des étoiles polaires variait suivant l’éloignement où l’on était des pôles : ce qui n’arriverait point, si la surface de la terre était plate. Ensuite divers philosophes prétendirent démontrer la sphéricité de la superficie des eaux. Mais leur raison la plus simple pour attribuer cette figure à la terre fut probablement son ombre, qui paraît ronde dans les éclipses de lune. Enfin, sur quelque fondement que l’opinion de la rondeur de la terre se soit