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chicha, espèce de boisson faite avec du maïs, est leur liqueur favorite.

Ce penchant pour l’ivrognerie est si général, que la dignité de cacique ni l’emploi d’alcade ne sont pas un frein pour ceux qui en sont revêtus. Ils courent avec le même emportement aux fêtes, et la chicha met au même rang le cacique, l’alcade et leurs plus vils subordonnés. Mais ce qui doit paraître assez étonnant, les femmes, les filles et les jeunes garçons sont absolument exempts de ce vice. Il n’est permis qu’aux pères de famille de boire jusqu’à l’épuisement de leurs forces, parce qu’il n’y a qu’eux qui aient droit d’attendre du secours lorsqu’ils ont perdu connaissance.

Celui qui fait célébrer une fête invite chez lui toutes les personnes de sa connaissance, et tient prête une quantité de chicha proportionnée au nombre de ses convives. Chacun doit avoir sa cruche, dont la mesure est au moins de trente chopines. Dans la cour de la maison, si c’est une grande bourgade, ou devant la cabane, si c’est en pleine campagne, on met une table couverte d’un tapis de Tucuyo, réservé pour ces occasions. Tout le festin se réduit à la camcha, ou maïs rôti, avec quelques herbes sauvages bouillies à l’eau. Les femmes servent à boire à leurs maris. Lorsque la gaieté commence à les animer, quelqu’un bat d’une main une espèce de tambourin, et de l’autre joue du flageolet, tandis qu’une partie des assistans de l’un et de l’autre sexe forme