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siles de table. Un métis ou un Américain qui se trouve à portée de prendre une pièce d’argenterie ne manque jamais de s’en saisir, et choisit toujours la moins précieuse, dans l’espérance qu’on s’en apercevra moins facilement. S’il est découvert, il s’excuse par un mot, qui est même introduit dans la langue espagnole du pays. Ce mot est yanga, qui signifie sans nécessité, sans profit, sans mauvaise intention. C’en est assez pour établir que le voleur n’est pas coupable : il rend la pièce avec la liberté de se retirer ; mais, s’il n’est point aperçu, il n’y a point de preuves qui puissent constater le fait lorsqu’il s’obstine à le désavouer.

Le langage qu’on parle à Quito et dans les autres parties de la province n’est point uniforme. La langue espagnole est aussi commune que la péruvienne. Il y a dans toutes les deux un mélange de quantité de mots pris et corrompus de l’une et de l’autre. La première que les enfans parlent est la péruvienne, parce que c’est celle de leurs nourrices. Il est rare qu’un enfant sache un peu d’espagnol avant l’âge de cinq ou six ans ; et dans la suite, les jeunes gens se font un jargon mêlé, dont ils ne peuvent se défaire. Un Espagnol qui arrive d’Europe a besoin d’un interprète pour les entendre.

Le climat de Quito est si singulier dans ses variations, que l’expérience est nécessaire sur ce point pour corriger les erreurs du jugement.