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de deux de ses confidens, armés comme lui de toutes pièces. Après un sommeil très-court, il commençait sa ronde autour des quartiers ; et ce qu’il y a de plus étrange, c’est qu’ayant conservé de son éducation des sentimens de piété, il n’était guère sans un chapelet au cou ou à la main.

Cependant sa troupe avait grossi de jour en jour. Les nègres mêmes désertaient en grand nombre pour l’aller joindre ; et la terreur de son nom glaçant le courage des Espagnols, comme sa prudence déconcertait leur politique, il ne se trouvait plus personne qui eût la hardiesse de marcher contre lui. Dans la crainte même qu’il ne demeurât pas long-temps sur la défensive, un assez grand nombre de bourgades furent abandonnées, et ne se sont jamais rétablies. Le désordre ne pouvant qu’augmenter, on prit le parti de tenter la négociation. Un religieux franciscain, nommé le P. Remi, qui avait eu part à l’éducation du cacique, et qui connaissait la bonté de son naturel, se promit de lui faire goûter des propositions raisonnables, lorsqu’elles seraient accompagnées d’une bonne garantie pour l’exécution. Son offre fut acceptée : on le chargea de promettre à tous les rebellés le pardon du passé, et pour l’avenir une entière exemption de travail.

Il partit avec un plein pouvoir, dans une barque dont le pilote eut ordre de le débarquer vers l’endroit où les montagnes de Bao-