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Il parla des deux puissances, le pape et l’empereur, qui concouraient à tirer les Américains de l’esclavage du démon. Pouvait-il se flatter, remarque l’historien, de faire entendre par un discours de quelques lignes des matières si nouvelles à cette nation ? Philippillo, qui n’y entendait pas beaucoup plus que l’inca même, lui en donna une explication à laquelle le prince ne comprit rien. Il y répondit néanmoins par un discours très-raisonnable, dans lequel il recommandait ses sujets à la générosité des fils du soleil. Rien de plus pathétique que ce que Garcilasso lui fait dire en faveur de ses peuples ; ses officiers en furent touchés, et ne purent retenir leurs larmes. Il promit aux deux Espagnols d’aller voir le lendemain leur chef. Ils se retirèrent plus charmés des richesses qu’ils avaient vues que sensibles à l’opinion qu’on avait d’eux.

Le gouverneur, apprenant que le prince devait venir le jour suivant, partagea soixante chevaux, dont toute sa cavalerie était composée, en trois compagnies de vingt chacune, il leur donna pour commandans Fernand Pizarre, Soto et Belalcazar, qui se rangèrent derrière un vieux mur pour n’être pas vus d’abord des Américains, et leur causer plus de surprise en se montrant tout d’un coup. Il se mit lui-même à la tête de son infanterie, consistant en cent hommes, dont il fit un bataillon ; et dans cet ordre il ne craignit point d’attendre un prince qui venait avec des trou-