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deux cents Espagnols. La fortune leur préparait encore bien des peines. Ils trouvèrent quantité de rivières, qui ont, à leur embouchure, des caïmans, sorte de crocodiles toujours prêts à dévorer les hommes. Après avoir consommé leurs provisions, ils n’eurent pour ressource que le fruit des mangliers dont ce pays est couvert, et dont les racines, abreuvées d’eau de mer, donnent au fruit un goût fort amer. Leurs canots, qui ne pouvaient aller qu’à la rame, luttaient sans cesse contre les courans, par lesquels ils étaient emportés vers le nord. Les habitans ne perdaient pas une occasion de les attaquer, et leur reprochaient d’être des paresseux qui aimaient mieux ravager les terres d’autrui que de cultiver le pays de leur naissance. La perte de plusieurs Espagnols qui périssaient de misère, ou par les armes de ces barbares, fit régler entre les deux capitaines qu’Almagro retournerait à Panama pour en tirer des vivres et des recrues. Il revint avec quatre-vingts hommes, et ce renfort leur donna la hardiesse de pénétrer dans le pays de Catamez, terre médiocrement peuplée, dans laquelle ils trouvèrent abondamment des vivres. D’ailleurs ils étaient soutenus par la vue de l’or, qui était fort commun chez la plupart des nations qu’ils avaient visitées, et dont ils se procuraient quelquefois une quantité considérable par des échanges paisibles ou par la force. Les Américains eux-mêmes qui les attaquaient avaient le visage parsemé de clous