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avec leurs œufs, qu’elles conservent soigneusement. Les Espagnols font beaucoup de cas de ces œufs pour nourrir leurs poules. Pendant la saison sèche, elles se répandent dans tous les lieux qui ont des arbres, et jamais on n’en voit dans les savanes. Les bois sont alors remplis de leurs sentiers, qui sont aussi battus que nos grands chemins, et larges de trois ou quatre pouces. Elles partent fort légères, mais elles reviennent chargées, de pesans fardeaux, tous de la même matière et d’une égale grosseur. On ne leur a jamais vu porter que des monceaux de feuilles vertes, si gros qu’à peine voit-on l’insecte par-dessous. Cependant elles marchent fort vite sur une fort longue file, et comme empressées à se devancer mutuellement.

On distingue une autre espèce de grosses fourmis noires, qui ont les jambes longues et qui marchent en troupes. Elles paraissent occupées d’un objet commun, qu’elles cherchent avec les mêmes mouvemens et la même inquiétude ; ce qui ne les empêche point de suivre régulièrement leurs chefs. Elles n’ont pas de sentiers battus, et leur marche est comme incertaine. Dans l’Yucatan, où elles sont en fort grand nombre, on en voit quelquefois entrer des bandes entières dans les cabanes, où elles s’arrêtent à fureter et à piller jusqu’à la nuit. L’habitude où l’on est de les voir partir avant la fin du jour, rend les habitans tranquilles, sans compter qu’il serait difficile de les chasser.