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premiers seigneurs de l’empire, surtout aux officiers militaires. On faisait aussi dans le grand temple, à certains jours de l’année, une idole dont la matière pouvait se manger, et que les prêtres dépeçaient pour en donner les fragmens à ceux qui venaient les recevoir : c’était une espèce de communion à laquelle on se préparait par des prières et des purifications établies : l’empereur même assistait à cette cérémonie avec une partie de sa cour.

Quoiqu’une partie des victimes humaines fût sacrifiée dans le grand temple, et que les Mexicains eussent l’horrible usage d’en manger la chair, ils réservaient les têtes, soit comme un trophée qui faisait honneur à leurs victoires, soit pour se familiariser avec l’idée de la mort. Le lieu qui contenait cet affreux dépôt était devant la principale porte du temple, à la distance d’un jet de pierre. C’était une espèce de théâtre de forme longue, bâti de pierre, à chaux et à ciment ; les degrés par lesquels on y montait étaient aussi de pierre, mais entremêlées de têtes d’hommes dont les dents s’offraient en dehors. Aux côtés du théâtre il y avait quelques tours qui n’étaient fabriquées que de têtes et de chaux. Les murailles étaient revêtues d’ailleurs de cordons de têtes en plusieurs compartimens, et de quelque côté qu’on y jetât les yeux, on n’y voyait que des images de mort. Sur le théâtre même, plus de soixante poutres, éloignées de quatre à cinq palmes les unes des autres, et