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hui. Après ces paroles, dont il jugea bien qu'elle entendrait le sens, il la supplia de lui dire qui elle était et comment elle était entrée dans ce cabinet. Je m'appelle Elsibery, lui répondit-elle, je suis la fille du gouverneur de Lemnos, ma mère n'est à Tharse que depuis deux jours où elle n'était jamais venue non plus que moi ; elle se baigne présentement, je n'ai pas voulu me baigner, et le hasard m'a fait entrer, dans ce cabinet. Mais je vous conjure, ajouta-t-elle, de m'apprendre aussi qui vous êtes. Alamir fut bien aise de trouver une jeune personne qui ne le connût pas ; il lui dit qu'il s'appelait Sélémin (ce fut le nom qui s'offrit le premier à son esprit). Comme il parlait, il entendit du bruit ; Elsibery s'avança vers la porte du cabinet pour empêcher qu'on entrât, Alamit la suivit de quelques pas oubliant le péril où il se mettait. Ne saurait-on espérer de vous revoir, madame ? lui dit-il. Je ne sais, repartit-elle avec un air plein de trouble, mais il me semble qu'il n'est pas impossible. En disant ces mots, elle sortit et ferma la porte.

Alamir demeura charmé de son aventure, il n'avait jamais rien vu de si beau ni de si aimable qu'Elsibery ; il croyait avoir remarqué qu'il ne lui déplaisait pas. Elle ne le connaissait point pour le prince de Tharse : enfin il y trouvait tout ce qui le pouvait toucher, et il demeura jusques à la nuit dans ce cabinet, sans songer qu'il y était venu pour voir Zoromade, tant il était rempli de l'idée d'Elsibery.

Zoromade n'était pas si tranquille ; elle aimait véritablement Alamir ; le péril où elle savait qu'il était exposé lui donnait une inquiétude mortelle et un dé