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croisade contre les albigeois.

qu’ils leur font abandonner la lutte. [5185] « Seigneurs, » dit le comte, « je vous dis en vérité que jamais nous n’en viendrons à bout de ce côté ; mais, si vous voulez me suivre, je vais les tromper. » Tous, sans en excepter un, éperonnent ensemble : ils pensèrent aller dans le Bourg par la porte Cerdane[1], [5190] mais ceux qui étaient là les reçurent si bien que la lutte s’engagea dans les rues. Par l’effort des massues, des pierres, des épées, des coignées, des guisarmes, qui rendaient le carnage terrible, ils (les Toulousains) leur firent vider la rue et la place.

[5195] La bataille dura jusqu’au soir ; alors le comte se retira, affligé et soucieux, au château Narbonnais où on poussa maint soupir. Puis, il fit venir les barons de la ville qu’il retenait comme otages, et les interpella avec colère et dureté : [5200] « Barons, » dit le comte, « vous ne pouvez vous échapper ; et, par la sainte mort que Dieu a bien voulu souffrir, toute la richesse du monde ne pourra m’empêcher de vous faire couper la tête ou sauter du haut en bas du Château[2]. » Quand ils l’entendent jurer et parler avec fureur, [5205] il n’y en a pas un qui ne tremble par crainte de la mort. Mais l’évêque réfléchit et met toute sa pensée à chercher le moyen de ramener la ville et ses habitants[3]. La nuit il fit aller et venir les messagers, pour presser et conseiller

  1. Cerdana, « la porte Sardane », Fauriel, j’ignore d’après quelle autorité.
  2. Réd. en pr. : « Le comte a fait venir tous ceux qui étaient prisonniers au château, leur disant que, s’ils ne lui rendaient la ville, il les ferait tous mourir..... »
  3. Le récit de la réd. en pr. est fort différent ; voy. au t. I la note sur le v. 5206.