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croisade contre les albigeois.

l’étoupe, du sel, des onguents, des emplâtres, des bandes d’étoffe[1] pour les coups et les blessures douloureuses. Mais que Beaucaire soit sans crainte : il n’en doit plus avoir, car le comte de Montfort et les autres chefs [4915] ne reprendront pas la ville !

CLXX.

Ils ne la reprendront pas ; car voici qu’ils se mettent à considérer dans leur conseil les périls, les tourments, les fatigues, les guerres, les maux, les luttes, les pertes, les souffrances ; car le comte de Montfort est dépité et dolent, [4920] et convoque ses hommes et ses parents. Dans la tente de soie, où l’aigle resplandit, ils parlent et délibèrent en secret : « Seigneurs, » dit le comte, « Dieu me fait connaître par des signes apparents que je suis hors du sens ; [4925] car j’étais puissant, preux et vaillant, et maintenant ma situation est réduite à rien. Ni la force, ni la ruse, ni l’audace ne me donnent moyen de recouvrer mes barons et de les tirer de là dedans. Et pourtant, si je quitte ainsi honteusement le siége, on dira par le monde que je m’avoue vaincu. — [4930] Beau frère, » dit Gui, « je vous dis en vérité que Dieu ne veut plus souffrir que vous teniez plus longtemps la ville de Beaucaire ni le reste. Il regarde et pèse votre conduite : [4935] pourvu que toute la richesse, tout l’argent soient à vous, peu vous importe la mort des hommes ! » Là dessus, voici un messager qui vient précipitamment tout droit au

  1. Voir savenal au vocabulaire.