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croisade contre les albigeois.

et mes ordres. » Vient ensuite l’archevêque de Narbonne, disant : « Sire, puissant et digne père, le sens abonde en vous ; jugez et gouvernez sans crainte, [3475] et que ni la peur ni l’argent[1] ne vous éloignent de Dieu[2] ! — Barons, » dit le pape, « la cause est jugée : le comte est catholique et se comporte loyalement, mais que Simon tienne la terre !

CXLIX.

« Que Simon tienne la terre, si c’est la volonté de Dieu ! [3480] et nous, jugeons selon le droit, comme nous avons commencé[3]. » — Et il prononce et juge, de façon que tous l’ont écouté : « Barons, je dis que le comte est un vrai catholique. Et si le corps est pécheur et sous le coup d’aucune faute, mais que l’esprit en soit contrit, en fasse l’aveu et s’en repente, [3485] la faute retombe sur le corps, et le pénitent doit être sauvé[4]. C’est pour moi grande

  1. Il l’engage à ne pas se laisser corrompre par des présents.
  2. Traduit conformément à la correction proposée au v. 3475. — Il n’est pas invraisemblable que l’archevêque Arnaut Amalric, autrefois le chef véritable de la croisade, ait parlé dans un sens peu favorable à Simon de Montfort. Il était alors en lutte avec lui au sujet de ses droits sur le duché de Narbonne, et la lutte dura jusqu’à la mort de celui-ci. Les pièces relatives à cette querelle sont analysées dans la nouvelle édition de l’Histoire de Languedoc, V, 1569-72.
  3. Ou p.-è., « comme il (le droit) est fixé » ; empres peut admettre cette interprétation.
  4. Cette distinction un peu subtile fait penser aux débats du corps et de l’âme si fréquents au moyen-âge ; sur lesquels on peut voir Th. Wright, Latin poems attributed to W. Mapes, p. 95 et ss. 321 ss., Du Méril, Poésies lat. ant. au XIIe siècle (1843), p. 217 ; Germania III, 396 ss., etc. L’idée consiste, à attribuer la faute au corps afin de décharger l’âme.