Page:La Boëssière - Traité de l'art des armes, 1818.djvu/24

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
xix
SUR SAINT-GEORGES

que des coups de temps et d’arrêt qui se succédoient comme des coups de foudre.

Il sauvoit aux plus forts le coup d’arrêt et le coup de temps, et l’attaque, ne se réservant que la parade et la riposte, et aucun ne pouvoit le toucher. Dans cet exercice où il déployoit toute la grace et les moyens que lui avoit accordés la nature, il surprenoit les spectateurs. En tirant avec ses amis, il avoit une complaisance, dont cependant il ne falloit pas se prévaloir ; car s’il s’en apercevoit il prenoit sa revanche avec intérêt ; il ne suffisoit pas de le voir tirer pour juger son talent, il falloit être assez avancé dans les armes pour tirer avec lui, c’est alors que l’on reconnoissoit toute sa supériorité.

Cette supériorité, il l’a conservée jusqu’à quarante ans, âge auquel il eut le malheur de se casser le tendon d’achille du pied gauche en dansant. Cet accident influa beaucoup sur sa vitesse ; ne pouvant plus ployer le jarret, il avoit moins de réaction dans la partie gauche ; malgré ce désavantage, il conservoit encore une grande supériorité sur tous les tireurs ; sa main étoit toujours la même ; il l’avoit si légère et la soutenoit à une si belle hauteur qu’il n’a jamais blessé personne dans le temps où les masques n’étoient point en usage.