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les plus belles, s’abandonnent à la joie des festins, boivent impunément le vin aux sombres couleurs [1] et dévorent toute ma fortune. II n’est plus maintenant qu’un héros tel qu’Ulysse pour écarter la ruine de notre palais. Je ne puis à présent me défendre (mais un jour je leur paraîtrai terrible, quoiqu’ignorant l’art de combattre) ! Oh ! comme je les repousserais si j’en avais la force ! De tels excès ne peuvent plus se tolérer, et ma maison périt sans honneur [2]. Soyez donc enfin saisis de honte, et redoutez les reproches des peuples voisins qui nous entourent ! Craignez la colère des dieux, de peur qu’irrités ils ne punissent vos crimes comme ils le méritent !

Au nom de Jupiter Olympien, au nom de Thémis qui réunit et disperse les assemblées des hommes, réprimez-les, ô mes amis, et laissez-moi seul me livrer à ma douleur profonde ! Si jamais mon père, le vertueux Ulysse, se rendit coupable de quelque injustice envers les Achéens aux belles cnémides [3] et les accabla de maux, soyez coupables à votre tour, vengez-vous sur moi et rendez-moi toutes ces infortunes en excitant ces audacieux ! Je préférerais vous voir dévorer mes provisions et mes troupeaux : car bientôt viendrait le jour où je serais dédommagé. J’irais sans cesse par toute la ville vous adresser mes prières, et je vous redemanderais mes biens jusqu’à ce que vous me les eussiez entièrement rendus. Mais aujourd’hui vous accablez vainement mon âme de douleurs ! »

    grand-père avait été étranger, il aurait dit : πρὸς τὸ ἄστυ (pros to astu), ou bien πρὸς τὴν γαῖαν (pros tên gaian), dans la ville ou dans le pays habité par Icare. Ces mêmes critiques ajoutent : Comment Eumée, qui chérissait si tendrement ses maîtres, aurait-il dit au XIVe chant, v. 68 : « Plût aux dieux que toute la race d’Hélène eût péri dans sa source ? » car Hélène étant la fille de Tyndare, frère d’Icare, Pénélope se serait trouvée comprise dans l’imprécation si elle eût été fille de ce même Icare. — De tout ceci, il faut conclure qu’Icare, père de Pénélope, n’était ni Lacédémonien ni Céphalénien, mais habitant d’Ithaque.

  1. Il y a dans le texte grec : αἴθοπα οἶνον (aithopa oinon) (vin noir), que les traductions latines de Clarke et de Dübner ont rendu par nigrum vinum. Le mot αἴθοψ (aithops) a été omis par tous les traducteurs français.
  2. Bitaube a traduit οὐδ’ἔτι ϰαλῶς οἶϰος ἐμὸς διόλωλε (ma maison périt sans honneur) par : mon nom va être extirpé de la terre avec infamie.
  3. Madame Dacier, Bitaubé et Dugas-Montbel oublient tous trois de mentionner l’epithète ἐΰϰνημις (euknêmis) (aux belles cnémides) qu’Homère donne aux Grecs. — Voir l’Iliade, liv. I, notes.