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qui mangent le gland nourrissant et boivent l'onde limpide afin d'entretenir leur graisse florissante. Tu resteras en ces lieux pour t'informer de tout ce qui t'intéresse, tandis que moi j'irai à Sparte, patrie des belles femmes, pour y chercher Télémaque, ton fils chéri. Ce jeune héros s'est rendu dans la vaste Lacédémone, auprès de Ménélas, pour s'informer de ta destinée et pour savoir dans quel lieu tu respires encore. »


Le prudent Ulysse lui répond aussitôt :


« Pourquoi ne lui avoir pas dit tout ce que tu savais ? Faut-il que Télémaque erre maintenant sur la mer stérile et qu'il souffre des malheurs sans nombre pendant que des étrangers dévorent son héritage ? »


Minerve aux yeux d'azur réplique à ces paroles :


« Ulysse, que son sort ne te donne aucune inquiétude. C'est moi-même qui l'ai conduit à Sparte pour qu'il y obtînt de la gloire. En ce moment ton fils n'éprouve aucune peine ; il est heureux et il repose dans le palais d'Atride, où pour lui tout est en abondance. Cependant des hommes audacieux se tiennent en embuscade sur leur navire et désirent tuer ton fils avant qu'il ne touche à la terre de sa patrie ; mais ils n'accompliront pas ce funeste projet : car auparavant la terre renfermera un grand nombre de ces orgueilleux prétendants qui dévorent son héritage[1] ! »

En disant ces mots, Minerve le frappe d'une baguette, et ride la peau délicate d'Ulysse sur ses membres flexibles ; elle dépouille la tête du héros de sa blonde chevelure et donne au fils de

  1. Dugas-Montbel fait observer que Knight, n'admet pas ce vers ; selon ce critique, les anciens manuscrits ne le portent pas, et il n'est point donné par Eustathe. Knight prétend qu'il est pris dans l’Odyssée, XIII, vers 396, et XIV, vers 332. Wolf renferme ce vers entre deux parenthèses. En ce cas, le sens serait simplement : « La terre engloutira quelqu'un » tournure qui a quel­que analogie avec celle-ci du V livre de l'Iliade : ......... πρίν γ ἕτερόν γε πεσόντα Αἴματος ᾶσαι Αρηα ......... Auparavant un autre, en tombant, rassasiera Mars de son sang. » — Ces deux vers sont reproduits au quinzième chaut de l’Odyssée, et dans cet autre passage ils sont tous les deux contestés par Knight. (Dugas-Montbel, Observations sur le chant XIII. )