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à merveille… il est mort au bout de huit jours… et il n’a pas eu une seule indigestion.

Mon Dieu ! Je comprends très bien que l’on mange beaucoup, mais pas chez soi… Tenez, un bon moyen si vous avez bon appétit, prenez pension à table d’hôte. Là, par exemple, mangez trop ! c’est le même prix : plus vous mangerez, mieux ça vaudra. Au bout de huit jours, l’hôtelier vous fera appeler, vous rendra votre argent et vous offrira une prime si vous voulez aller prendre votre repas chez un confrère ; il vous donnera même des adresses ; je la connais : je l’ai fait cent fois…

Eh bien ! Encore une économie !… Quand vos souliers sont crottés vous payez six sous un commissionnaire, n’est-ce pas ? Naïfs ! Moi, j’attends… et dès que je vois un gogo comme vous qui fait cirer, je fourre mon pied à côté du sien ; le commissionnaire croit que c’est l’autre pied du monsieur et me cire mon soulier ; le monsieur, ahuri, n’ose rien dire, et je les laisse se débrouiller ensemble pour le troisième pied, pendant que je vais rechercher un second gogo pour avoir la paire.

C’est comme au jeu, tenez ! Parce que, avec mes principes d’économie il ne faudrait pas croire que je ne suis pas joueur ! Mais voilà, j’ai ma façon… Quand je vois des gens qui jouent, n’est-ce pas… je ne parie pas sur eux… à moins que ce ne soient des grecs… seulement je me mets derrière eux et je me dis : "tiens, voilà un coup que j’aurais bien joué" et je parie en moi-même… des sommes énormes !… Alors quand je perds, je gagne… je gagne l’argent que je ne perds pas, et j’ai les mêmes émotions que les joueurs… seulement à l’envers, voilà.