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leur, s’éloigne le roi d’Alger, renié par sa dame.

Roger veut tout d’abord le suivre, pour lui reprendre son bon destrier, en vue duquel il a déjà revêtu ses armes. Mais il se souvient de Mandricard avec qui il doit se battre. Il laisse donc aller Rodomont, et revient sur ses pas, afin d’entrer dans la lice avec le Tartare, avant que le roi de Séricane n’y descende lui-même vider sa querelle au sujet de Durandal.

Se voir enlever Frontin sous ses yeux et ne pouvoir l’empêcher lui est fort pénible, mais il est fermement résolu à reconquérir son cheval, dès qu’il aura mis fin à son entreprise avec Mandricard. Quant à Sacripant, qui n’est pas retenu par un engagement comme Roger, et qui n’a pas autre chose à faire, il s’élance sur les traces de Rodomont.

Et il l’aurait eu bientôt rejoint, sans une aventure imprévue qui se présenta sur son chemin et qui, le retenant jusqu’au soir, lui fit perdre les traces qu’il suivait. Il vit une dame qui était tombée dans la Seine et qui allait y périr, s’il ne lui avait pas aussitôt porté secours. Il sauta dans l’eau et l’en retira.

Puis, quand il voulut remonter en selle, il s’aperçut que son destrier ne l’avait pas attendu, et il dut le poursuivre jusqu’au soir, car le malin cheval ne se laissa point prendre facilement. Il parvint enfin à le rattraper ; mais alors il ne put revenir au sentier dont il s’était fort écarté. Il erra par monts et par vaux plus de deux cents milles avant de retrouver Rodomont.