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son destrier fit que Marphise eut besoin de l’aide de Roger.

Le destrier de Marphise, en voulant tourner trop court, glissa sur l’herbe humide d’une si malheureuse façon, que la guerrière ne put le retenir et qu’il tomba sur le côté droit. Au moment où il cherchait à se relever, il fut heurté en plein flanc par Bride-d’Or, sur lequel s’avançait le païen peu courtois, et forcé de tomber de nouveau.

Roger, voyant la damoiselle par terre et en grand danger, se hâta de la secourir. Il le pouvait d’autant plus facilement que son adversaire, tout étourdi, avait été emporté au loin. Il frappa sur le casque du Tartare un coup terrible qui lui aurait fendu la tête comme un trognon de chou, si Roger avait eu Balisarde en main, ou si Mandricard avait eu sur la tête un autre armet.

Le roi d’Alger cependant, ayant repris ses sens, tourna ses regards tout autour de lui et aperçut Richardet. Se souvenant que c’était lui qui l’avait attaqué et qui avait secouru Roger, il piqua droit à lui, et il allait lui faire payer cher son intervention, si Maugis, avec un grand art et par un nouvel enchantement, n’était venu s’interposer.

Maugis, en fait de maléfices, en savait autant que le plus habile magicien. Bien qu’il n’eût pas avec lui le livre avec lequel il aurait pu arrêter le soleil, il avait parfaitement à l’esprit la formule par laquelle il conjurait d’habitude les démons. Il en envoie un sur-le-champ dans le corps du roussin de Doralice, et le met en fureur.