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avec les plus communs on fait les rudes liens qui enchaînent les damnés.

Sur tous les pelotons qui étaient déjà placés en ordre, et choisis pour le second labeur auquel ils étaient destinés, étaient les noms, gravés sur de petites plaques les unes en fer, les autres en argent ou en or. On en avait fait de nombreux tas qu’un vieillard emportait sans jamais en rendre aucun, ni sans paraître jamais las, et auquel il revenait toujours puiser de nouveau.

Ce vieillard était si expéditif et si agile, qu’il paraissait être né pour courir. À chacun de ses voyages, il emportait plein le pan de son manteau des noms ainsi gravés. Où il allait, et pourquoi il faisait ainsi, cela vous sera dit dans l’autre chant, pour peu que vous montriez à m’écouter votre complaisance habituelle.


CHANT XXXV


Argument. — Éloge du cardinal d’Este. Le poète montre comment le temps efface les noms des hommes obscurs, et voue à une immortelle renommée ceux des hommes illustres. — Bradamante défie Rodomont, le jette dans le fleuve et suspend son armure à la tombe d’Isabelle. Elle combat contre Serpentin, Grandonio et Ferragus qu’elle jette tour à tour hors de selle. Elle appelle Roger au combat.



Qui donc, madame, montera au ciel pour m’en rapporter l’esprit que j’ai perdu le jour où le trait qui est parti de vos beaux yeux m’a