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courtoisie. Si de l’un on doit raconter que, sur les bords du Taro et dans le royaume, il fut assez puissant pour délivrer l’Italie des Français, on dira de sa compagne, qui resta seule et chaste, qu’elle égala Pénélope, la femme d’Ulysse.

« Je résume en quelques mots, et j’en laisse plus d’un, les grands et nombreux mérites de cette dame que Merlin me fit connaître autrefois dans la grotte, le jour où pour aller à lui je me séparai du vulgaire. Et si je voulais déployer ma voile sur cette grande mer, je naviguerais plus longtemps que Tiphys. En somme, je conclus que le ciel la dotera des vertus les plus remarquables.

« Elle aura près d’elle sa sœur Béatrice à laquelle un tel nom conviendra de tout point, car non seulement elle possédera pendant sa vie tous les biens qu’il est permis d’avoir ici-bas, mais elle rendra son mari le plus heureux des princes, de telle sorte que, lorsqu’elle aura quitté ce monde, il retombera au rang des plus infortunés.

« Tant qu’elle vivra, le Maure, et Sforce et les couleuvres des Visconti seront redoutés, des neiges hyperboréennes aux rivages de la mer Rouge, de l’Inde aux monts qui donnent passage à la mer. Elle morte, eux et le royaume d’Insubrie tomberont en esclavage, au grand dommage de toute l’Italie. Sans elle la suprême prudence paraîtra aventureuse.

« 11 en existera encore d’autres, portant le même nom, et qui naîtront bien des années avant elle. L’une d’elles ornera ses beaux cheveux de la splen-