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nuit et jour chemine. Il rejoignit le port d’où il avait tout d’abord pris la mer, et montant tout armé sur Bride-d’Or, il laissa derrière lui les vents et l’onde salée.

Je crois que pendant le reste de l’hiver il fit des choses dignes d’être racontées ; mais elles furent alors tenues si secrètes, que ce n’est pas ma faute si je ne puis vous les redire. Roland était en effet plus prompt à accomplir des actions vaillantes qu’à les raconter ensuite ; ceux-là seuls de ses hauts faits nous sont connus, qui ont pu avoir des témoins.

Comme il passa le reste de l’hiver sans faire parler de lui, on ne sut rien de bien certain à son égard ; mais après que le soleil eut éclairé le signe de l’animal discret qu’emporta Phryxus, et que Zéphire, joyeux et suave, eut ramené le doux printemps, les admirables exploits de Roland reparurent avec les fleurs brillantes et la verdure nouvelle.

Du mont à la plaine, de la campagne au rivage de la mer, il va, plein de souci et de douleur. Soudain, à l’entrée d’un bois, un long cri, une plainte aiguë lui frappent les oreilles. Il presse son cheval, saisit son glaive fidèle et se dirige en toute hâte à l’endroit d’où vient le bruit. Mais je remets à une autre fois de vous dire ce qui s’ensuivit, si vous voulez bien m’écouter.