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morte parmi les fleurs sur l’herbe. Mais les dames crièrent : « Qu’il te suffise qu’elle soit vaincue, sans poursuivre une plus cruelle vengeance. » Le chevalier courtois remet son épée au fourreau. Passons le pont, et poursuivons notre route.

Ils suivirent pendant quelque temps un chemin difficile et rude, à travers un bois, et qui, outre qu’il était étroit et rempli de pierres, montait presque en ligne droite au haut de la colline. Mais, dès qu’ils eurent atteint le faîte, ils débouchèrent dans une prairie spacieuse, où ils aperçurent le plus beau et le plus ravissant palais qui se soit jamais vu au monde.

En dehors des portes extérieures, la belle Alcine s’avança de quelques pas au devant de Roger, et lui fit un accueil seigneurial, entourée de sa brillante cour d’honneur. Tous ses courtisans comblèrent le vaillant guerrier de tant d’hommages et de révérences, qu’ils n’en auraient pu faire plus, si Dieu était descendu parmi eux de sa demeure céleste.

Le palais n’était pas seulement remarquable parce qu’il surpassait tous les autres en richesse, mais parce qu’il renfermait les gens les plus aimables et les plus avenants qui fussent au monde. Ils différaient peu les uns des autres en fleur de jeunesse et de beauté ; mais Alcine était plus belle qu’eux tous, de même que le soleil est plus beau que toutes les étoiles.

Elle était si bien faite de sa personne, que les peintres industrieux ne sauraient en imaginer de