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de vue. Pas de serviteur pour l’extérieur et le travail du logis. Antoine Gorgon se chargeait des provisions au marché, et des courses au dehors ; Jacques veillait à la cuisine ; Lina et Thérèse se réservaient les chambres, Léa la lingerie et le couvert. Était-ce un phalanstère ? Non.

Cette famille exploitait simplement les plaisirs de l’amour dans leurs tableaux suggestifs, près de quelques hautes notabilités de la vieille aristocratie ou de la finance, près de quelques horizontales huppées voulant réchauffer les sens d’un entreteneur sérieux, ou en découvrir un nouveau. Métier peu banal et pas facile, qui nécessitait une entente très serrée et une liberté absolue entre soi, pour se satisfaire d’abord dans ses goûts personnels afin de bien les traduire pour les fantaisies d’autrui, pour n’éprouver ensuite aucune contrainte dans les aventures qui parfois en résultaient. Aussi, si le maire et le curé avaient consacré les mariages, la volonté familiale avait décrété qu’on userait sans jalousie les uns et les autres des caprices d’une sensualité souvent excitée par les tableaux qu’on répétait pour bien les rendre devant les clients. On s’était expliqué bien gentiment et bien franchement, pour que les