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CHAPITRE II


Le Félibrige : Mistral, Aubanel, Roumanille, Paul Arène. — Timoléon, Saint-Estève et Félix Baret. — La librairie Lemerre : Coppée, Heredia, Sully Prudhomme, Leconte de Lisle, Cazalis. — Édouard Drumont.



Tandis que Zola ajustait ses tuyaux entre le romantisme et un réalisme conforme aux exigences de son odorat, un phénomène de reviviscence dotait la branche d’oc de la littérature française d’un certain nombre d’admirables œuvres. À l’origine de toute reviviscence, il y a un homme de génie et son effort. Vous nommez déjà Frédéric Mistral. Auprès de lui, Roumanille et Aubanel, le premier chargé comme une abeille des diverses essences de son terroir, le second, un des plus beaux et des plus amers lyriques de l’amour. Alphonse Daudet était l’ami, le fidèle compagnon de Mistral. Tout jeune, il m’apprit à l’admirer et à l’aimer. Ce groupe enchanté des écrivains provençaux est lié à mes plus chers et joyeux souvenirs. L’Arlésienne fait partie du cycle, ainsi que les Contes de mon moulin. J’y rangerais aussi Jean des Figues et la Gueuse parfumée de Paul Arène, homme grincheux, prosateur exquis, dont les subtils accès de mauvaise humeur et les trouvailles en matière de jouets parisiens ont tour à tour stupéfié mon enfance. J’ai chanté le Bâtiment vient de Majorque et Jean de Gonfaron des « Îles d’Or » en même temps que Malborough et la Tour prends garde. J’ai, tout petit, mangé des olives et des figues fraîches, bu du châteauneuf-du-pape aux jours de fête, et ce mot « la Provence » a toujours évoqué pour moi, si loin que je regarde en arrière, des routes blanches entre les cyprès, des refrains, des rires, un amusement fou.