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CHAPITRE PREMIER


Les grands hommes du régime : vision de Hugo, de Gambetta, de Renan, de Rochefort, aux environs de 1880.
Un salon républicain protestant ; Clemenceau.
La librairie Charpentier. — Le naturalisme de Zola. — Médan.
Vision de Flaubert, Goncourt et Maupassant.



On retrouverait facilement, dans les palmarès de distribution de prix à Louis-le-Grand, celui où Ernest Renan, aux environs de 1880, déprécie la petite fleur incolore et sèche appelée immortelle. L’auteur de la Vie de Jésus parlait aux jeunes élèves d’une voix distincte, affectueuse, ses yeux mi-clos dans sa large face d’éléphant sans trompe. Mon père avait été appelé à prendre place à ses côtés, sur l’estrade officielle ; comme je venais chercher mes prix, le vieillard amoureux du doute, me serrant contre sa joue couenneuse, me glissa dans l’oreille : « Nous ferons de vous quelque chose. »

Vers la même époque, Léon Gambetta, large lui-même comme une table de douze couverts et rouge comme quelqu’un qui vient d’avaler de travers un drapeau, dînait à la maison, avenue de l’Observatoire. On lui dit que je travaillais bien. Il m’embrassa longuement, proconsulairement, avec ces mots : « Nous ferons de toi quelque chose. La République est l’amie des travailleurs. »

Elle devait le montrer par la suite, cette brave République des rhéteurs bouffis, notamment à Fourmies, Chalon, Draveil et Narbonne. Cependant ni Renan, ni Gambetta n’eurent l’occasion de tenir leurs promesses à mon endroit. La bassesse et l’illogisme des milieux parlementaires devaient faire de moi un