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DE L’IMAGINATION

rythme nécessaire, à une succession prévue de meurtres, de guerres et d’empires. Le murmure qui sort de l’histoire a aussi ses phases déterminées, ses moments de piano et deforte. À distance, les sociétés apparaissent ainsi que des fourmilières, dont je ne sais plus quel savant anglais modifiait la destinée en versant sur certaines espèces une cuillerée d’une autre espèce, tant qu’il s’offrait en raccourci la constitution des races et des royaumes.

La beauté de l’Imagination étant surtout dans la croyance à la Liberté qu’elle nous donne, je devine pour l’historien une vraie torture s’il en arrive à ce point de vue de la fatalité, du déterminisme moderne.

Moi. — Je m’attache à cette phrase que tu viens de prononcer et qui m’enchante : La beauté de l’imagination étant surtout dans la croyance à la liberté qu’elle nous donne.

Que tu l’admettes ou non, ceci est de la métaphysique pure, et il est curieux qu’on ne puisse aborder aucune question grande ou petite, sans que la science des sciences ne fasse son apparition à un moment donné et ne contraigne l’esprit à creuser plus avant, jusque dans propre substance.

Cette torture du déterminisme, très apparente dans l’histoire et les historiens, est, en réalité, le fléau de l’imagination. Elle semble lui imposer