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LE MARCHAND DE BONHEUR

du village ; ce qui subsiste d’autrefois ; ce qui ne s’est point dégradé. Je ne demande point pour chaque clocher son Mistral. Le grand poète est rare. Mais il ne manque pas d’esprits consciencieux pour cette admirable besogne. On serait stupéfait des richesses intellectuelles et morales de la France ; c’est un trésor qu’on gâche : les costumes, les patois, les récits. — Ô les beaux contes gascons de Bladé ! »

Un tel livre, assez compact, sur le Périgord, de M. Le Roy, que lui avait recommandé son ami le sénateur Dussolier, l’enchanta. Je me rappelle le titre : Le Moulin du Frau. Il le vantait à tous ses amis. Il me le prêta. C’était une œuvre complète où l’auteur se donnait entièrement, racontait sa Petite patrie avec un souci prodigieux du vrai : « Que ne l’imite-t-on ! s’écriait mon père. Je suis avec joie les conséquences de l’impulsion qu’a donnée Mistral. S’il a agi dans le domaine poétique. Drumont, lui, a agi dans le domaine social. Le sens profond de sa hardiesse est analogue. Le retour à la tradition ! Voilà ce qui peut nous sauver, dans la déroute contemporaine. Toujours j’ai eu l’instinct de ces choses. Elles ne me sont apparues nettement que depuis quelques années, grâce aux efforts de mes deux grands amis. Il est mauvais de perdre entièrement ses racines, d’oublier son