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point, en tout cas, et nous laisse toute l’incertitude de ses décisions. Car la liberté, cette divinité si chère aux opprimés, cette brûlante aspiration des esclaves, n’est pas en soi un principe actif, n’est pas une loi susceptible de développements, n’est pas une science. La liberté correspond, dans l’ordre moral, à la santé dans l’ordre physique ; elle est l’absence du mal ; elle permet tout ; elle ne donne rien. Les forces créatrices avec elle ont toute leur puissance ; mais c’est l’état normal ; si le compression les altère, la liberté n’y ajoute pas. Tout l’état antérieur de l’humanité nous a fait de la liberté un être enivrant, une déesse ; et si elle ne peut donner, ce qu’elle doit nous rendre assurément est immense en comparaison de ce qui est. Mais ses bienfaits n’existent que par opposition aux maux de l’esclavage. C’est la loi de notre expansion individuelle ; ce n’est pas la loi sociale ; ce n’est pas un principe organisateur.

La loi sociale, c’est la justice. — Et, sous un autre nom, la justice c’est l’égalité.

On peut discuter les applications de l’égalité, mais on ne peut soutenir qu’elle ne soit pas le fondement de la notion de justice. Les tribunaux n’en ont pas d’autre et l’appliquent même avec une rigueur élémentaire, soumettant à la même peine l’homme instruit et l’ignorant, le faible et le fort. Tous nos jugements, en ce qu’ils ont de général, n’ont point d’autre base que l’égalité humaine. Toute comparaison s’y fonde. En ce temps où nous sommes, enfin, nulle affirmation n’est plus générale et plus accentuée. Nous ne différons que sur les moyens de faire passer l’égalité dans les faits ; mais là nous différons, il est vrai, beaucoup. En négligeant le vieux système des castes, qui a fait son temps, nous trouvons l’application la plus restreinte de l’égalité dans le système, exa-