Page:Léger - Recueil de contes populaires slaves, 1882.djvu/78

Cette page a été validée par deux contributeurs.
60
CONTES SLAVES

prédécesseurs. Mon visage n’est point affligé d’un nez recourbé comme un quartier de lune, ni d’une barbe pointue comme une pioche, ni de défenses de sangliers. Je ne louche ni ne boite. Je ne suis ni batailleur ni pédant, je ne fais point de vers et je ne bois pas. Je suis de si haut rang que les comtes et les princes, les rois et les empereurs s’inclinent devant moi. Je suis si riche, si puissant que tous les trésors, tous les honneurs de ce monde disparaissent devant moi. J’ai pourtant un petit défaut, c’est d’être un vagabond terrible. Toute l’année, nuit et jour, sans repos, sans relâche, je cours le monde ; on me voit errer du nord au midi, sur terre et sur mer, dans les villes et dans les déserts. On me reçoit tantôt dans le palais des rois, tantôt dans la cabane du pauvre. Je moissonne également les vieux et les jeunes, les beaux et les laids. Aujourd’hui ton tour est venu ; je suis ce fiancé que tu as attendu pendant tant d’années. Et je viens te chercher pour t’emmener dans mon château de Six-Planches.

La fille des doges tremblait de tous ses membres.

— Arrière, s’écria-t-elle, arrière ! Je n’ai encore accepté aucun fiancé. Je ne veux pas