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CONTES SLAVES

dras bien m’excuser. Il n’y a point d’homme parfait en ce monde, je n’excepte ni toi, ni moi… Je dois t’avouer aussi que j’ai un certain faible pour le vin de Tokay et que…

— Impudent, misérable, s’écria Zora, comment oses-tu seulement te présenter devant moi, fille de doge, reine de Chypre, l’orgueil et la gloire de mon sexe ? Où as-tu jamais vu que l’aigle ait reçu le hibou dans son nid ? Arrière ! arrière ! ou je fais lâcher mes chiens sur toi.

Le Hongrois ne se laissa pas déconcerter. Il frisa majestueusement sa moustache et répliqua :

— Mon Dieu ! sans doute l’aigle ne prend pas un hibou dans son nid ; mais le hibou n’admet pas le dindon dans le sien. D’ailleurs, en entrant dans ton château, j’ai vu quelque chose dégringoler par la fenêtre et tomber dans le puits. Je suis de mœurs un peu brutales, mais j’ai bon cœur au fond ; j’ai envoyé mes serviteurs voir ce qui arrivait. Ils ont retiré du puits une fille un peu rousse, mais jeune et assez jolie. Elle était encore en vie. Je suis venu ici pour chercher femme, et, ma foi, je verrai si la rousse lâchera des chiens après moi.