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La plupart sont consacrées, selon M. N., qui exagère sa pensée et les faits, au culte des morts. En tout cas, la fête des morts est l’une des plus notables, et des plus instructives ; car nous y voyons fonctionner sur le vif une institution considérable, répandue dans toute l’aire de la civilisation esquimau. Dans cette fête (p. 364 sqq.), le mort est représenté par son « namesake » le porteur de son nom (Cf. p. 289, 371, 377, 324), qui lui est identifié ; car, à chaque mort, le premier né de la localité porte le nom du dernier disparu. L’institution est un peu plus compliquée, mais passons (v. Boas, op. cit., p. 367). D’autres fêtes ont encore pour but l’évocation des âmes des morts (celle des âmes d’enfants en particulier). D’autres enfin, bien que destinées surtout à la multiplication du gibier, et à l’incantation des armes, sont adressées aux âmes des animaux tués à la chasse pour les prier de rentrer dans d’autres corps (fête des vessies, p. 385 sqq.), et reçoivent, de cette interprétation, une assez curieuse coloration.

L’étude des rites funéraires des Esquimaux du détroit de Bering serait digne d’intérêt (p. 310 sqq.), surtout de ceux qui concernent l’enterrement et le cimetière (v. p. 311, un curieux équivalent de la rame qu’Ulysse plante sur le tumulus de son fidèle Elpénor). — La magie, son système, l’institution des angekoks et leurs pouvoirs surnaturels, leurs révélations, leurs esprits, leurs amulettes sont particulièrement bien étudiés (p. 427 et suiv.). Mais nous signalons tout à fait à part les excellentes observations de M. N. sur les rites oraux (p. 349 et sqq.). Ce sont le plus souvent des chants attachés à des danses, mais bien distincts, par leur efficacité spéciale, des purs amusements chorégraphiques et vocaux ; ils consistent en formules simples et monotones, à force évocatoire, répétées d’ordinaire collectivement (p. 354), et souvent attachées à des travaux (p. 347) d’ordre économique.

La plus grande partie du livre est consacrée à une considérable monographie technologique, la collection de M. Nelson ayant été une des plus complètes qui aient été rapportées. — Sur la morphologie sociale de ces Esquimaux, nous avons aussi de bons renseignements, en particulier à propos des diverses formes de l’habitation (longue maison d’hiver et tente de petite famille en été, p. 288 sqq.). — Le point où les observations de M. Nelson ont le plus mal porté est évidemment la vie morale et juridique de ces sociétés, encore qu’il nous donne de bons aperçus sur la vendetta, les chants de dénigrement, etc. ;