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peurs nitreuses, et alors, pour s’en défendre, l’apparition de ces masques et cagoules aux yeux de verre ronds, qui évoquent, dans les tranchées, l’image des Pénitents de jadis, des Frères de la Miséricorde, ou encore le sac à fenêtre rectangulaire ou le groin qui pend sous le menton.

Déjà, M. Clairin a tenté de reproduire quelques-uns de ces aspects dans son tableau : Les Masques et les gaz asphyxiants. Ainsi le gaz, qui est une arme amorphe, oblige l’homme à revêtir une armure amorphe, qui supprime sa personnalité. C’est la lutte de l’invisible contre l’inconnaissable. De même sur mer : l’attaque d’un navire qui s’est enveloppé d’un nuage artificiel, par un sous-marin plongé dans l’eau, n’est plus une chose dont le sens de la vue puisse se saisir. Que veut-on que le peintre en fasse ? Certes, le drame n’est pas moins poignant : il est plus poignant peut-être qu’aux beaux jours du combat chevaleresque. Il exige des nerfs plus solides, une conscience plus assurée, une obstination plus constante. Mais il ne se manifeste plus par des gestes qu’on puisse peindre : il se passe tout entier dans le cœur de l’homme.